Manuel Espagne
Stress et dépression post-traumatique, les reconnaître pour s’en libérer.

Le syndrome de stress post-traumatique (SSPT) est un type de trouble anxieux qui se développe généralement après avoir été impliqué ou témoin d'événements traumatisants. Autrefois considéré comme n'affectant que les individus ayant été exposés à la guerre, le SSPT peut en réalité toucher n'importe qui.
Qu'est-ce que le SSPT?
Ressentir de la peur face à une situation effrayante ou potentiellement dangereuse est tout à fait normal. A vrai dire, cette peur est même essentielle à notre survie. Elle déclenche des réactions physiologiques et psychologiques qui visent à préserver notre intégrité en cas de menace ou de péril imminent. Désignées comme “Fight or Fly” ces réactions de combat ou de fuite sont naturelles et œuvrent à nous protéger.

La plupart des gens ressentent un certain nombre de ces réactions après avoir subi un traumatisme, qui se rétablissent et disparaissent généralement peu de temps après l'événement.
Pour certaines personnes cependant ces symptômes ne s'atténuent pas, elles peuvent se sentir maintenues dans un état de frayeur ou stress permanent et elles connaissent souvent des flashbacks se répétant des années après le trauma, qui se manifestent brutalement au décours de situations par ailleurs banales.
C'est lorsque ces symptômes persistent sans rémission et qu’ils bouleversent la vie quotidienne d’un sujet que le SSPT peut être évoqué.
On pense que cet état de stress post-traumatique intéresse une personne sur trois ayant vécu une expérience traumatique intense, et on ne comprend pas encore pourquoi certains développent la maladie et d’autres pas. Le SSPT peut se manifester immédiatement à la suite de l'événement, ou il peut apparaître à des semaines, des mois, voire des années de distance.
Combattre, fuir ou se figer? Apprenez-en davantage sur ces réactions naturelles.
Réaction physiologique en réponse au stress, la mise en oeuvre du système “Fight, Fly or Freeze” est caractérisée entre autres par une augmentation de la fréquence cardiaque et de la pression artérielle, une élévation du taux de glucose dans le sang et une redistribution du sang du tube digestif vers les muscles. Ces changements sont causés par l'activation du système nerveux sympathique par l'épinéphrine (adrénaline), qui prépare le corps à défier ou à fuir une menace perçue.

Ces effets sont reliés à la stimulation d’une structure neuro-anatomique profonde nommée amygdale, dont l’origine développementale remontent à l’évolution du cerveau reptilien. Il s’agit d’un noyau aux fonctions réflexes (dont les fibres ne passent pas par les centres nerveux corticaux) dont l’activité ou l’inhibition se traduit par des comportements attenants essentiellement à la survie et à la reproduction.
Symptômes du SSPT:
Dans la plupart des cas, les symptômes du SSPT se développeront au cours du premier mois suivant l'événement traumatisant. Cependant, dans certains cas, il peut s'écouler une période de latence d’une durée très variable avant que ceux-ci n'apparaissent.
Les symptômes diffèrent également selon les individus. Certaines personnes connaîtront de longues phases durant lesquelles ne se présentent que des symptômes mineurs, moins visibles, pour ensuite connaître des périodes où ils sont plus intenses. D'autres auront des symptômes sévères ab-initio, affectant profondément leur qualité de vie autant que leurs interactions sociales.
Bien que l’expression de symptômes spécifiques du SSPT varie selon les individus, il existe des signes communs associés qui entrent généralement dans les catégories suivantes.

Réminiscences:
C’est l’un des symptômes les plus courants du SSPT. La réminiscence est une re-création intérieure de l'événement déclencheur. Elle se produit généralement sous la forme de flashbacks vifs, de cauchemars, d'images ou de sensations répétitives et douloureuses, de manifestations physiques, telles que tremblements, transpiration abondante, nausée etc...
On note fréquemment des pensées négatives à propos de l'événement, des questions répétitives ainsi qu’un sentiment de victimisation ou d’impuissance. «Pourquoi cela m'est-il arrivé? Aurais-je dû ou pu l'arrêter? "
L’expression d’une honte et/ou d’une forme de culpabilité est un trait commun à la plupart des patients, qui se perçoivent ainsi de façon très dégradée et qui par conséquent tendent à s’isoler davantage.
Évitement et inhibition émotionnelle:

Un autre symptôme clé du trouble de stress post-traumatique consiste à l’adoption de comportements actifs cherchant à éviter tout rappel du traumatisme initial.
Il est courant que les personnes atteintes de SSPT finissent par nier l’existence de leurs souvenirs, en les refoulant ou en les dissimulant derrière une forme d’hyper-activité, qu’elle soit physique ou intellectuelle.
D'autres personnes peuvent essayer de faire face à ce qu'elles ressentent en tentant d’en éteindre complètement la partie émotionnelle.
Ne rien ressentir semble parfois être l'option la plus simple. On parle alors d’émoussement affectif pouvant entraîner isolement et retrait, souvent associé à une perte du plaisir dans les activités qu'ils appréciaient autrefois.
Hypersensibilité et hyper-vigilance:
Le SSPT peut entraîner un tableau d'anxiété généralisée et des difficultés à se détendre. Lorsqu’ils éprouvent ce symptôme, les patients peuvent avoir le sentiment de présence d’un danger imminent ou d’une menace pour leur sécurité, et ils peuvent être facilement effrayés ou emportés par des accès d’agitation.
L'hypervigilance peut entraîner une irritabilité accrue, des troubles du sommeil, une instabilité émotionnelle et des difficultés de concentration.
Les autres troubles:
Le SSPT peut avoir un effet néfaste sur toutes les sphères de vie d’une personne. En plus des signes décrits précédemment, les personnes atteintes de SSPT sont susceptibles de présenter d'autres manifestations cliniques telles que :
Des symptômes purement psychologiques appartenant au spectre des névroses d’angoisse, dont les plus courants comprennent l'anxiété, la dépression, les phobies et les troubles obsessionnels compulsifs.
Des plaintes somatiques telles que des maux de tête, des douleurs thoraciques, des maux d'estomac ou bien encore des vertiges.
Des comportements autodestructeurs, anorexie, abus de drogues ou d'alcool et tentatives de suicide en tout premier lieu.
Quelles en sont les origines?
N'importe qui peut être touché par le SSPT. Ce trouble anxieux peut se développer après un événement effrayant, potentiellement mortel ou pénible, ou après une expérience traumatique prolongée.
Les types d'événements soupçonnés d'entraîner un trouble de stress post-traumatique comprennent:
accidents de la route graves
aggression violente
abus sexuels prolongés
situation de combat, bombardement, déportation
terrorisme
catastrophes naturelles
morts violentes
maladie, blessure ou décès d'un être aimé...
Qui est à risque?
Bien qu’à trauma identique on ne sache pas pourquoi certaines personnes peuvent développer la maladie et d'autres pas, il existe tout de même certains facteurs prédisposants au développement du SSPT.
Selon le DSM, les patients présentant des antécédents de dépression ou d’anxiété généralisée sont plus susceptibles de manifester un SSPT après la survenue d’un événement pénible.

D'autres facteurs de risque incluent le fait d'avoir reçu peu ou pas de soutien moral après l'événement traumatisant, et particulièrement d'avoir vécu le traumatisme dans l'enfance.
Les enfants peuvent évidemment être aussi affectés par ce syndrome. Ils éprouvent généralement des symptômes similaires à ceux des adultes, cependant, certains sont plus spécifiques, tels que l'énurésie, l'anxiété de séparation ou les crises de terreurs nocturnes.
Qu'est-ce que le SSPT grave?
Le SSPT grave est une notion relativement nouvelle, reconnue comme une condition dans laquelle l'individu ressentira certains des symptômes du SSPT, ainsi que des symptômes pouvant évoquer ceux que l’on observe sur un terrain de structure psychotique, tels que des hallucinations, un repli autistique, une hétéro-agressivité, des automatismes mentaux, des propos délirants etc...
On rencontre le SSPT grave chez certains individus ayant vécu la répétition de situations traumatisantes de façon prolongée, telles que négligence grave, abus sexuels, viols ou violences systématisées.
Demander de l'aide pour le SSPT
Après avoir vécu un événement particulièrement tragique, il est normal de se sentir confus et totalement bouleversé.

Dans une grande majorité des cas, les angoisses et les pensées négatives s'atténuent après quelques semaines, suivant une cinétique naturelle d’intégration et de refoulement.
Si les troubles persistent au-delà d’un mois après l'événement, il faut absolument envisager de consulter un médecin qui évaluera les symptômes et, si nécessaire, orientera la personne vers un spécialiste de la santé mentale.
Sans les ressources et un soutien thérapeutique approprié, faire face seul au SSPT peut s'avérer impossible. En l’absence de prise en charge, les conséquences psychosociales de cet état peuvent être plus graves que l'événement déclencheur en lui-même, on pense à la perte d’emploi, à la dépression grave, à la marginalisation.
Si vous êtes concerné(e) ou inquiet pour un être cher, il est important que vous demandiez de l’aide. Il existe de multiples solutions de soutien disponible pour les personnes touchées par le SSPT, et même s'il n'est jamais facile d’appeler au secours, vous n'êtes pas seul.
Traitement du Syndrome de Stress Post Traumatique:
Les principes généraux du traitements du trouble de stress post-traumatique incluent des médicaments et / ou une psychothérapie relationnelle. Comme chaque individu et chaque histoire diffère, la façon dont le SSPT se manifeste variera de sorte qu’il n’existe pas de traitement ou de protocole que l’on puisse généraliser à toutes les situations.
Les anxiolytiques et antidépresseurs ne sont pas systématiquement prescrits, mais ils peuvent s’avérer très utiles dans le cadre du SSPT.
Dans une certaine mesure et uniquement devant des formes légères, ils peuvent être proposés en substitution d’une thérapie “classique”.

Les événements et expériences traumatisants peuvent être très difficiles à gérer.
Il est fondamental de permettre à la personne d’exprimer ses ressentis, de se confronter à ses sentiments de lui proposer l’accompagnement par un professionnel formé à ce type de problématique, seul moyen réellement efficace pour traiter le SSPT.
La plupart de ces syndromes sont réversibles et trouvent leur résolution plusieurs années après l’événement déclencheur, cela qui signifie qu’il n’est jamais trop tard pour s’en occuper!
La Thérapie Cognitivo-Comportementale (TCC) axée sur les traumatismes est une forme de thérapie bien adaptée au SSPT. Elle se concentre sur la nature des pensées et des croyances, et comment ces dernières affectent les comportements.
Elle vise à offrir des compétences intellectuelles et émotionnelles nécessaires pour faire face à des situations difficiles ou à leurs conséquences.

L'Eye Movement Desensitization and Reprocessing (EMDR) propose une approche basée sur la réalisation de mouvements oculaires rapides simultanément à une re-mémorisation de l’expérience traumatisante.
Cette méthode avance le postulat selon lequel l'effet des mouvements oculaires rapides est similaire à la façon dont notre cerveau traite et intègre les souvenirs et les expériences durant le sommeil paradoxal, dont les Rapid Eye Mouvement (REM) sont l’un des signes observables.
Cette pratique a été spécifiquement conçue comme traitement pour aider les personnes vivant avec des souvenirs traumatiques particulièrement difficiles, et elle a démontré son efficacité auprès de militaires déployés en opération de combat ainsi que de victimes d’attentats, y compris celles n’ayant pas ou peu développé les symptômes d’un SSPT au sens strict du terme.
Comment l'hypnothérapie peut-elle être utile?
L’hypnothérapie est un outil extrêmement utile pour aider les patients à faire face aux symptômes et conséquences de leur SSPT. Lorsqu’elle est associée à l'EMDR, l'hypnose est considérée comme le moyen le plus efficace de traiter ces sujets.
Les procédures hypnotiques formelles sont particulièrement efficaces car cette population est hautement hypnotisable.

L'hypnose fournit un accès contrôlé à des composantes mémorielles qui pourraient autrement rester hors du champ de la conscience. Ses nouvelles utilisations dans la psychothérapie des victimes du SSPT impliquent de coupler l'accès aux souvenirs traumatiques dissociés à une restructuration positive du déroulé des événements ainsi que des images des images peuvent lui être associées.
L’hypnose est utilisée pour aider les patients à faire face et à supporter une expérience traumatisante en l'intégrant dans un nouveau contexte, en leur offrant la possibilité de reconnaître leur impuissance lors de sa survenue, et en reliant cette expérience à des souvenirs re-moralisants tels que des notions d'autoprotection, la mémoire de l’affection ou des valeurs partagées avec d’autres victimes, ou encore la capacité de contrôler l'environnement à d'autres moments de leur vie.
.
De cette manière, la transe hypnotique offre aux individus un accès sécurisé à certains éléments de leurs histoires, qui sont ensuite replacés dans une perspective plus large.
Des techniques d'auto-hypnose leur permettent ensuite de prolonger les bénéfices du travail engagé par des méthodes de tri et d'atténuation, réduisant ainsi la survenue de souvenirs intrusifs, spontanés et involontaires.
Conclusion:
Un traumatisme mal intégré peut amener une personne à se déconnecter de son propre sentiment interne de sécurité, et à s’isoler socialement.
Les conséquences physiologiques de l’exposition à un stress prolongé sont potentiellement graves, allant de l'aggravation de pathologies existantes à l’apparition de profonds désordres organiques, de maladies cardio-vasculaires et troubles psychiatriques.
Ainsi, plus les effets d’un trauma sont gérés précocement, plus la personne se rétablira rapidement, et meilleur sera le pronostic.
La promesse portée par l'hypno-thérapie est qu'elle permet aux sujets d’accéder à des ressources inconscientes qu’ils peuvent immédiatement utiliser pour résoudre les pensées et émotions négatives qui les retiennent dans leurs processus de guérison.
Manuel Espagne - Fev. 2021